Alberto Magnelli (1888-1971)
L'Uomo Ubriaco
signé, daté et inscrit 'ALB. MAGNELLI 1914 ''L'UOMO UBRIACO'' FIRENZE 1914 NE PAS VERNIR' (au revers)
huile sur toile
99.5 x 74. 5 cm.
Peint à Florence en 1914

signed, dated and inscribed 'ALB. MAGNELLI 1914 ''L'UOMO UBRIACO'' FIRENZE 1914 NE PAS VERNIR' (on the reverse)
oil on canvas
39¹⁄₈ x 29³⁄₈ in.
Painted in Florence in 1914

Atelier de l'artiste.
Susi Magnelli, Meudon (par succession en 1971 et jusqu'à au moins 1975).
Galerie Karl Flinker, Paris.
Galerie Hasenclever, Munich.
Vente, Christie, Manson & Woods Ltd., Londres, 29 mars 1988, lot 176.
Collection particulière, Italie (acquis au cours de cette vente); vente, Christie's, Londres, 15 octobre 2007, lot 209.
Acquis au cours de cette vente par le propriétaire actuel.

A. Maisonnier, Alberto Magnelli, L'Œuvre peint, Catalogue raisonné, Paris, 1975, p. 56, no. 39 (illustré; décrit comme signé et daté 'Magnelli 14' (en bas à droite)).

Les courbes amples qui composent la silhouette de l’homme ivre dans la toile de Magnelli, L’uomo ubriaco (1914), révèlent le langage plastique, de plus en plus formel et abstrait, que l’artiste forgeait alors. Cette année-là, Magnelli se rend à Paris, où il retrouve ses amis de l’avant-garde italienne installés dans la capitale française. Il avait déjà entrevu l’effervescence artistique qui animait la scène parisienne, et dans cette œuvre transparaissent à la fois l’influence du cubisme et celle du futurisme de ses compatriotes.
Magnelli vivait alors à Florence, où il peignit nombre de ses chefs-d’œuvre en 1914, moment décisif et fondateur de sa carrière. Dans L’uomo ubriaco, l’écho des mouvements contemporains se devine dans le choix bohème du sujet, mais surtout dans la planéité et l’abstraction qui structurent la composition. Les bras se déploient en arcs souples et gracieux, tandis que le profil du visage s’inscrit dans une succession organique de courbes, évoquant les sculptures abstraites que Jean Arp créera bien plus tard. Cette rigueur géométrique, ces lignes et ces courbes, se voient adoucies par le contraste du nœud et de la bouteille : détails lyriques qui rompent la stricte organisation colorée et géométrique du reste de la toile, tout en révélant l’humanisme qui en est le moteur.
L’homme ivre devient ainsi une figure élégante de modernité, inspirant l’artiste à affiner un idiome visuel singulier, en pleine affirmation à ce moment précis de l’histoire. L’influence parisienne, bien que vécue à distance, est manifeste : Magnelli envisagera même de s’y installer, projet que la Première Guerre mondiale viendra interrompre. Sa soif de contacts avec l’avant-garde sera néanmoins largement assouvie grâce aux liens noués à Paris et ailleurs, tant comme collectionneur — réunissant pour son oncle des œuvres de Picasso, Matisse, Gris ou Archipenko — que comme artiste à part entière. L’enthousiasme suscité par ses toiles, et son désir de réduire l’art à un minimum de moyens pour en accroître l’intensité expressive, lui vaudront l’appui du grand médiateur parisien Guillaume Apollinaire, par qui Magnelli deviendra l’ami de nombreux pères de l’art moderne.

The sweeping curves that comprise so much of the figure of the drunken man of Magnelli's 1914 painting L'uomo ubriaco reveal the increasingly formal and abstracted visual language that the artist was developing at this time. It was in 1914 that Magnelli travelled to Paris, visiting his friends amongst the Italian avant-garde who were based in the French capital at the time. Magnelli had already been exposed to some of the artistic developments happening in the thriving and vibrant art scene in the French capital, and in the present painting the influence of Cubism as well as the Futurism of his compatriots can be perceived. Magnelli himself was living in Florence at the time, and it was there that he painted so many of his masterpieces in 1914, the defining and groundbreaking moment of his early artistic career. In L'uomo ubriaco, the influence of some of the contemporary movements can be seen in part from the bohemian subject matter, but it is all the more evident in the planarity and abstraction with which Magnelli has rendered the scene. The arms are graceful, supine arcs while the profile of the man's face has been captured through an almost organic succession of curves that resemble the abstract sculptures that Jean Arp would create much later. At the same time, the formality of these forms, the lines and the geometric curves, are alleviated through their contrast with the bow and the bottle. These lyrical details provide a counterpoint to the rigidly organised colourism and geometry of the rest of the painting, while also revealing the humanism that has driven its creation. The drunken man has been converted into an elegant paragon of modernity, inspiring the artist to further hone the unique visual idiom that was coming into its own at precisely this moment in history. It is an indication of the influence that Paris had on the artist, albeit at a distance, that he would later consider moving to the city, although the intervention of the First World War put paid to that idea. Nevertheless, Magnelli's thirst for contact with the avant-garde would be largely slaked during this period through the contacts he made in Paris and elsewhere both as a collector, assembling an array of masterpieces by contemporaries such as Picasso, Matisse, Gris and Archipenko for his uncle, and as an artist in his own right. Indeed, it is a tribute to the excitement raised by Magnelli's paintings, and his interest in reducing art to a minimum of means that would be all the more intense and expressive, that he was espoused by the Parisian Svengali, Guillaume Apollinaire, through whose introductions Magnelli became a friend of many of the international fathers of modern art.