Les premiers piédestaux documentés de ce style dans les créations d'André-Charles Boulle apparaissent dès 1684. Cette paire de gaines à tablier a été réalisée d’après un modèle précis de l’ébéniste, vers 1709, pour Paul Poisson de Borvalais, place Vendôme. N’en subsistent aujourd’hui que deux exemplaires : une gaine acquise en 1714 par Auguste II de Saxe, conservée au Grünes Gewölbe de Dresde, et une paire, réalisée vers 1720, ayant appartenu au baron Alfred de Rothschild et vendue chez Sotheby’s à Paris le 2 octobre 2008, lot 7. Celle d’Auguste de Saxe était d’ailleurs décrite comme tel : « un scabellon ou piedestail de marcetterie fon et ornemens d’escaille garny de bronses et autres ornemens pour i posser des gand groupe de Proserpine », acquise au prix de 600 livres.

Particulièrement fier de sa création, André-Charles Boulle fait figurer des gaines comparables sur la planche de titre de ses Nouveaux Deisseins de Meubles et Ouvrages de Bronze et de Marqueterie, ensemble de gravures de modèles publiés par Jean Mariette. Remarquable par ses deux appliques latérales de bronze aux larges volutes, sa corniche appliquée de feuilles et de tournesols, son tablier marqueté en corne teintée et laiton d’un dessin partiellement repris des gaines octogonales du Grand Dauphin, ainsi que par sa plinthe ajourée formant quatre pieds, ce modèle connait un immense succès.

Elles sont ainsi copiées tout au long du XVIIIe siècle et du XIXe siècle par les plus grands ébénistes, tels que Delorme, Levasseur, Montigny, Nicolas Séverin, ou encore Mathieu Befort, dont une copie de ce modèle, réalisée vers 1825-1850, est conservée au Musée du Louvre (inv. 5061). Contrairement à de nombreuses copies tardives, notre paire de gaines conserve la précision des volutes latérales, la plinthe ajourée en arches et le raffinement de la marqueterie de Boulle.