Ce meuble appartient à un groupe de plusieurs commodes exécutées entre 1700 et 1715, qui peuvent être rattachées avec beaucoup de vraissemblance à la création de Renaud Gaudron (v.1653-1727), ébéniste du Garde Meuble de la Couronne et son principal pourvoyeur en meubles recouvertes de marqueterie de bois de rapport, de 1686 à 1713.
Parmi elles, plusieurs sont passées aux enchères : notons une commode à trois rangs de tiroirs (vente Artcurial, Paris, 14 décembre 2011, lot 15), une commode à quatre rangs de tiroirs (vente Ader-Picard-Tajan, Palais Galliera, Paris, 10 décembre 1973, lot 102) et une commode à trois rangs de tiroirs (ancienne collection Wildenstein, vente Christie's, Londres, 14-15 décembre 2005, lot 115).
D'autres commodes, également attribuées à Renaud Gaudron, se trouvent dans des collections muséales. Une commode très similaire par son décor et ses bronzes est conservée au musée des châteaux de Versailles et de Trianon, dépôt du Louvre (inv. 4655). Une commode d'une paire exécutée pour Louis, Grand Dauphin de France (1661-1711), et provenant du mobilier du roi Philippe V d'Espagne, est aujourd'hui conservée dans les collections royales madrilènes. Enfin, une commode d'un aspect tout à fait équivalent mais dont l'attribution est encore débattue, est conservée au musée des Arts décoratifs de Paris (inv. CLUNY 11762).
D'un aspect très similaire et avec peu de variations dans leur décor, dont certains motifs reviennent de manière récurrente, elles trahissent l'appartenance à la production d'un même atelier d'ébéniste. Souvent attribuées à son père, Aubertin Gaudron, ces commodes seraient davantage l'oeuvre de Renaud. En effet, d'après Calin Demetrescu, le type de la commode n'était pas encore inventée au moment du décès d'Aubertin Gaudron (C. Demestrescu, op. cit., p. 293).
De plus, les plateaux de ces commodes, travaillés en trompe-l’œil, avec des vases fleuris entourés d’oiseaux, papillons et libellules, s’inspirent des gravures de Jean-Baptiste Monnoyer (1636-1699). Monnoyer fut popularisé par Daniel Marot dans les Nouveaux Livres de Tableaux vers 1700. Le satyre souriant, motifs récurrent sur les commodes de Gaudron, évoque une gravure de Jean Le Pautre datant de 1657, Frisses, Feuillages et Ornements.
Renaud Gaudron, ébéniste du Grand Siècle
Renaud Gaudron (vers 1653–1727), fils du maître ébéniste Aubertin Gaudron et de Suzanne Valet, fut le dernier d’une fratrie de onze enfants. Formé avec son frère Nicolas dans l’atelier paternel, il devint maître avant 1684 et succéda à son père comme ébéniste ordinaire de la duchesse d’Orléans, Elisabeth-Charlotte de Bavière. Il entra ensuite au service du Garde Meuble royal, collaborant parfois avec son frère à Versailles. Spécialiste de la marqueterie de bois de rapport, il livra de nombreux meubles décorés de vases de fleurs, oiseaux, papillons, personnages grotesques et sphinges, motifs qui permettent d’identifier plusieurs œuvres conservées.