Une pendule d'alcôve en forme de lyre
Cette charmante pendule d'alcôve était destinée à être disposée dans une chambre à coucher au dessus du lit de son propriétaire. Un mécanisme de sonnerie à la demande permet de connaitre l'heure pendant la nuit.
Une source possible pour le dessin de la caisse de cette pendule se trouve dans un croquis conservé au musée du Louvre provenant de l’atelier de Charles Le Brun (inv. 30162). Celui-ci représente une lyre ornée de têtes de boucs, très proche dans sa forme, soutenue par deux putti. Ce croquis correspond à un groupe en plomb réalisé par Pierre Le Gros en 1673-1674 pour le Théâtre d’Eau à Versailles. Une gravure, conservée château de Versailles, immortalise cette oeuvre (inv. GR 155.26). Une gravure de Jean I Berain, vers 1690, destinée à l’ornement peint des Tuileries, montre une lyre semblable décorée de têtes de griffon (Ornements peints dans les appartements des Tuileries dessinés et gravés par Berain, édité par Nicolas Langlois à Paris, vers 1690). Toutefois, dans l’art de cette époque, les représentations de lyres ornées de têtes animales restent extrêmement rares.
Nous connaissons plusieurs modèles similaires à notre pendule, dans de grandes collections publiques et privées. Notons trois cartels d'alcôve comparables et attribués à André-Charles Boulle (1642-1732), dont la partie haute n'est pas en bronze doré mais en marqueterie de laiton doré et de corne teintée : un baromètre et une pendule formant paire sont conservés au Metropolitan Museum of Art, à New York (inv. 2019.283.68 et .69 ; anc. coll. Mme Charles Wrightsman) ; une pendule est conservée au Victoria and Albert Museum, à Londres (inv. 130-1865) ; enfin, une pendule similaire est conservée au J. Paul Getty Museum, à Los Angeles (inv. 73.DB.74 ; anc. coll. des barons Hillingdon, vente Christie's, Londres, 29 juin 1972, lot 56).
Une pendule du même modèle, le cadran, signé Julien Leroy, est décrite dans la vente de la collection du comte de Luc (Lieutenant général des armées du Roi et gouverneur de la citadelle de Marseille), à Paris, le 22 décembre 1777, lot 49 : Une pendule, le mouvement à répétition fait par Julien Le Roy, la boîte de Boulle, en bronze doré, en cartel représentant une lyre, à tête de bélier sur chaque angle du haut ...
Une autre pendule du même modèle provenant de la collection du comte de Choiseul-Praslin fut vendue à l'Hotel Drouot, à Paris, le 12 mars 1866, lot 121. Elle décrite ainsi : Cartel du temps de Louis XIV, en bronze doré, en forme de lyre. Il présente, dans sa partie inférieure, un mascaron à tête de femme et, dans sa partie supérieure, des têtes de bélier.
Une autre version de cette pendule, cette fois-ci sur pied et les angles supérieurs ornés de bustes féminins ailés, le mouvement signé J.-F. Laissé, a été vendue chez Lempertz en 1904 (anc. coll. Bourgeois Frères, vente Lempertz, à Cologne, 25 octobre 1904, lot 829). Cette version montre les différentes déclinaisons possibles de ce modèle, de la pendule murale à la pendule à poser.
Jean-Baptiste III Baillon, horloger de renom
Jean-Baptiste III Baillon fut l’un des horlogers les plus célèbres et prolifiques du XVIIIe siècle. Membre le plus prospère de sa prestigieuse famille, fils et petit-fils des horlogers Jean-Baptiste II Baillon (décédé en 1757) et Jean-Baptiste I de Rouen, il devint maître-horloger en 1727. En 1738, il fut nommé valet de chambre-horloger ordinaire de la Reine, puis premier valet de chambre en 1748 et enfin, en 1770, premier valet de chambre et valet de chambre-horloger ordinaire de la Dauphine Marie-Antoinette. De son vivant, Baillon connut un succès sans précédent, attirant une clientèle issue des plus hautes sphères de la société française, ainsi que du Garde-Meuble de la Couronne et de la famille royale d’Espagne.
Installé d’abord place Dauphine à partir de 1738, puis rue Dauphine après 1751, il doit son succès à sa capacité à organiser une manufacture vaste et florissante, dotée d’une ampleur sans précédent. Sa maison de Saint-Germain-en-Laye abritait une usine privée, dirigée de 1748 à 1757 par Jean Jodin (1715-1761), où la production se poursuivit jusqu’en 1765. En 1753, son confrère horloger Ferdinand Berthoud décrivit l’atelier de Baillon comme « la plus belle et la plus riche horlogerie ».
Baillon utilisait les diamants non seulement pour orner ses montres, mais aussi ses pendules, certaines dont les boîtiers, en petites boîtes d’or, étaient décorées de fleurs de diamants imitant la nature. Sa maison de Saint-Germain fonctionnait comme une véritable manufacture, remplie d’ouvriers travaillant continuellement pour lui, car il seul assurait la fabrication d’une grande partie des horloges et montres produites à Paris.